L’INEGALITE PROFESSIONNELLE HOMMES/FEMMES - 12 Octobre 2011
INTERVENANTS :
BRIGITTE LAMOURI, déléguée départementale aux Droits des Femmes et à l’Egalité.
ROKHAYA DIALLO, animatrice télé et radio, chroniqueuse et fondatrice de l’association « Les Indivisibles ».
SOPHIE PIORO,
sociologue experte en égalité professionnelle, interlocutrice du
cabinet PERFEGAL depuis Marseille et pour le sud de la France.
ELISABETH FERRO-VALLEE, ingénieure à l’Action Régionale pour le groupe AFNOR.
Dans
le monde, comme en France, 80% des travailleurs pauvres sont des
femmes. Il y a des raisons objectives à ces données. Les femmes
subissent les temps partiels imposés, les écarts de salaires, les
contrats précaires. La notion de classe moyenne tend à disparaître
tandis que l’écart entre les riches et les pauvres se creuse de plus en
plus.
Une personne pauvre en 2009 dispose d’un niveau de vie inférieur à 954 euros mensuels.
Les
femmes ont toujours travaillé mais il existe un réel problème d’égalité
entre hommes et femmes. A poste égal ou à compétences égales, une femme
touchera un salaire inférieur de 25% en moyenne comparé à un homme.
Écart d’autant plus important dans les fonctions d’encadrement.
Pour tenter d’analyser ce phénomène d’inégalité, Brigitte Lamouri se
rapporte aux fondements, c’est-à-dire à l’école. La scolarité au départ
est identique pour les garçons et les filles. Il s’avère qu’aux
résultats du Baccalauréat, le meilleur pourcentage de réussite est
attribué aux filles. Ce sont ces dernières qui se dirigent la plupart du
temps vers des filières littéraires au détriment des filières
scientifiques et techniques.
Ceci
révèle une tradition héritée des siècles précédents : les filles
étaient préparées à la maternité et les garçons à la production. C’est
le poids de l’Histoire.
Dans
les études supérieures, les filières d’excellence sont plus fréquentées
par les garçons (2/3 de garçons contre 1/3 de filles). Au niveau des
métiers, les postes les plus occupés par les femmes ont un rapport avec
la famille, le ménage, l’aide à la personne.
Les
femmes sont plus touchées par la précarité : en effet, 2/3 des familles
monoparentales comprennent la mère et ses enfants. Ce sont elles qui
ont le plus d’emploi à temps partiel (cf. graphique de l’INSEE ci-joint)
par exemple.
Ou
encore les carrières sont ralenties par la maternité. Tout ceci
constitue un frein économique pour elles car elles cotisent moins pour
la vieillesse, le chômage, etc.
La
disparité dans le monde du travail est également identifiable grâce aux
chiffres suivants : 2/3 des étudiants sont des étudiantes et 80% des
smicards sont des femmes. Cette tendance est beaucoup trop élevée. La
législation depuis 1957 (Traité de Rome) a beaucoup statué sur le
travail des femmes or l’on s’aperçoit que l’évolution n’a pas suivi la
norme européenne. Lors de la signature du dit « Traité », l’article 141,
affirme l’égalité de salaire entre les hommes et les femmes pour un
travail de niveau égal. Il stipule en effet que « chaque État membre
assurera pendant la première phase, puis par la suite maintiendra, le
principe selon lequel les hommes et les femmes doivent, à travail égal,
recevoir un paiement égal ». L’article 141 du traité de Maastricht
rajoute en 1992 la notion de travail de même valeur.
Petite révolution que ce lien établit enfin entre l’égalité des droits et l’égalité des salaires.
Pour
la petite histoire, c’est la France qui a insisté pour inclure cet
article dans le traité fondateur, or celle-ci a transposé au minimum les
directives européennes dans la loi française.
Malheureusement, le fonctionnement répressif des pouvoirs publics persiste :
il s’agit ici de sanctionner financièrement les établissements qui ne
respectent pas les lois d’égalité. C’est le système du bâton.
Il existe néanmoins des mesures incitatives créées par le Ministère du Travail, de l'emploi et de la santé afin de garantir une certaine parité dans l’entreprise. Cette mesure est le contrat pour la mixité des emplois.
Les outils de cette mesure sont :
- De meilleures orientations scolaires
- L’accès à des formations
- Une aide au conseil
- Des outils de droit commun
- Un Label Egalité (délivré en conformité avec les normes de l’AFNOR)
- Création d’un Fonds de Garantie à l’Initiative des Femmes garantissant des ressources financières à moyen terme lors de créations d’entreprises par les femmes afin de pallier le manque d’accès aux crédits des femmes
- La mise en place de la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences afin de garantir une évolution de carrière aux femmes.
Cette
démarche égalitaire n’est pas spontanée pour les établissements, mais
elle peut être accompagnée et des organismes peuvent aider les
entreprises.
Sophie Pioro,
qui pratique le conseil aux entreprises en matière d’égalité
professionnelle, assimile la division sexuelle à la socialisation, au
conditionnement d’une hiérarchisation des tâches et des rôles selon le
sexe de l’individu dont il est question.
Les
femmes cumulent un fort taux d’activité professionnelle ainsi qu’un
fort taux de natalité en France. Cette corrélation illustre l’effort
fourni par celles-ci.
75%
des femmes occupent des postes dans l’administratif ou bien dans le
tertiaire. De plus, les femmes sont à l’origine d’1/3 des créations
d’entreprises. Aussi se pose-t-on la question de l’évaluation des
compétences de celles-ci : elles seraient choisies car douées de
qualités dites « naturelles » comme l’aide aux personnes… !?
Les
femmes créatrices d’entreprises s’y mettent plus tardivement que les
hommes et ont moins accès aux financements. Leur prise de risque est
moins importante également.
Sociologiquement,
la répartition des tâches domestiques s’établit comme suit : 2h pour
les hommes contre 5h pour les femmes. Cet écart a une réelle
répercussion sur les temps de travail et vice-versa.
Les
études montrent une spécialisation de la répartition des tâches :
l’affectif, le matériel, le travail scolaire et le soin sont pour les
femmes ; le ludique, la transmission d’un goût ou d’un hobby sont pour
les hommes.
L’impact de la RTT : plus de tâches domestiques pour les femmes, plus de loisirs pour les hommes.
Les enjeux de l’égalité professionnelle sont, à terme :
- la modernité sociale,
- l’amélioration de la qualité humaine,
- l’amélioration de l’aspect socio-économique.
Les
moyens pour y arriver sont la volonté de mobilisation de la direction
(actions des RH), l’implication des partenaires sociaux de l’entreprise,
une méthodologie adaptée à chaque société, le partage d’expérience
inter-entreprises et l’appui d’une expertise externe. Ce dernier point
permet une réelle analyse objective de ce qui fonctionne et ce qui
nécessite amélioration.
Mieux que contraindre, il faut convaincre. C’est ce que le Label Egalité Professionnelle permet de faire, explique Élisabeth Ferro-Vallée.
Malgré tous les préjugés de la société qui pèsent sur le fonctionnement
actuel, les carrières des hommes et des femmes sont avant tout des
CHOIX. Aussi faut-il s’appliquer à les respecter et à les motiver. Pour
cela, il est donc question de lever les freins.
L’égalité
salariale n’est que la partie émergée de l’iceberg. En outre, il faut
accentuer les actions de formation continue pour les femmes dans les
secteurs moins accessibles et moins fréquentés par ces dernières.
La
mixité professionnelle n’est pas toujours facile à élaborer et la
formation interne peut permettre d’attirer des cibles diverses. Lors des
recrutements, le reproche du manque de disponibilité est fait aux
femmes or ce sont elles qui ont souvent des horaires sur des créneaux
difficiles (exemple : les ménages en entreprise, soit très tôt le matin,
soit très tard le soir).
Chaque
établissement doit trouver ses propres solutions et s’adapter à sa
structure. Afin de mettre en œuvre la mixité et l’égalité
professionnelle, l’on doit s’attarder sur 3 champs essentiels :
- La prise en compte de l’égalité dans les relations sociales, l’information et la culture d’organisme.
- L’égalité dans la gestion des ressources humaines et le management.
- L’égalité dans la prise en compte de la parentalité dans le cadre professionnel.
« La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent »
(A. Einstein)
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