LES FEMMES ET LA REPRESENTATION POLITIQUE
INTERVENANTS :
ROKHAYA DIALLO, animatrice télé et radio, chroniqueuse de fondatrice de
l’association « Les Indivisibles »
BRIGITTE LAMOURI, chargée De Mission Départemental aux Droits des Femmes et à
l’Égalité.
REJANE SENAC, chercheure CNRS au Centre de recherches politiques de
Sciences Po - CEVIPOF, enseigne à Sciences Po Paris et aux Universités
Sorbonne nouvelle et Pierre et Marie Curie, elle a en particulier publié le
"Que sais-je ?" sur La parité.
JACQUELINE MARTIN, maitresse de conférences en économie sociale, à la retraite,
de l’université de Toulouse, membre du CERTOP. Fondatrice du Master
professionnel « Genre et politiques sociales ».
On utilise
généralement le terme d’homme politique comme si cela était réservé au genre
masculin. Les femmes en politique sont souvent appelées par leur prénom, quand
les hommes sont désignés par leurs noms. On relèvera les remous de ces derniers
temps qui ont marqué les politiciennes : des femmes de l’hémicycle qui
s’interdisent le port de la jupe, ou les sifflets qui ont retentis dans
l’assemblée alors qu’une ministre se présentait en robe.
Au niveau
international, la France est très mal classée sur le point de vue de la place
qui est laissée aux femmes sur l’échiquier politique (69ème rang
mondial).
En parallèle,
on observe que la position occupée par les femmes de chefs d’Etat prend de plus
en plus de place : place de TRIERWEILLER lors de la dernière campagne
française, rôle de Michèle OBAMA dans la campagne de son mari (à noter qu’elle
était la supérieure hiérarchique de son mari au moment de leur rencontre, elle
a su réduire son rôle à l’extérieur pour se conformer à l’image de la femme
« d’intérieur »).
Petit retour historique :
Rappelons qui
était Olympe de Gouges, native de Montauban, elle est partie à la capitale pour
accéder à la centralité du pouvoir. Elle
était une des premières femmes féministes, visionnaire sur la place de la femme
dans la société et qui s’est fait couper la tête pour sa prise de position
politique. Elle était une femme engagée dans la lutte contre l’esclavage,
contre le racisme et les inégalités hommes/femmes... De manière générale, elle
se battait contre les inégalités fondées sur la naturalisation (couleur de
peau/sexe), l’altérisation (l’autre est absolument différent) et une
hiérarchisation.
Lors des
dernières élections françaises, la place des femmes sur le plan politique n’a
pas été oubliée avec la constitution d’un gouvernement paritaire, la nomination
d’un ministère pour le droit des femmes et une assemblée nationale avec un
tiers de femmes ; l’impression d’une vision optimiste pour l’avenir.
Seule ombre au
tableau : on parle de parité et non d’égalité, ce n’est donc pas un
aboutissement en soi pour les femmes. Il ne s’agit que d’un partage du pouvoir
revisité. Les femmes ont gagné des responsabilités en politique sans perdre
pour autant celles qu’elles avaient à charge à la maison. De plus, on peut se
demander sur quels types de postes ? Quelles candidates dans quelles
circonscriptions ? N’y a-t-il que la loi qui puisse faire avancer les
femmes en politique ?
Quelques
chiffres pour y voir plus clair : les femmes constituent 53% du corps
électoral et seulement 3 régions et 3 départements sont présidés par des
femmes. Dans le Tarn et Garonne, une seule femme est à l’assemblée départementale.
On peut simplement noter une sensible évolution du nombre de femmes maires et conseillères
générales.
Lorsque la loi
est contraignante, on se retrouve avec des listes à 48% de femmes (pas 50% car
les têtes de listes sont toujours masculines : rien n’est
« obligatoire » dans ce cadre là). Il y a à la fois une féminisation
dans les collectivités territoriales et une recomposition du pouvoir.
Il y a une
hiérarchisation des inégalités par rapport aux groupes dominés. L’accès à la
politique ne peut être un luxe, une fois que l’on aura l’égalité sur d’autres
aspects.
Aujourd’hui
pour la première fois dans l’histoire, le gouvernement est paritaire en
France : mais qualitativement il ne l’est pas autant qu’en Espagne (comme
avec le gouvernement Zapatero). La parité est par définition le partage à
égalité du pouvoir mais n’est pas forcément la considération des femmes comme
des pairs.
Les femmes font-elle une politique différente ?
Dans les
esprits, il est conçu que parce que ce sont des femmes, il faut que leur
politique soit différente, qu’elles apportent des choses nouvelles. Ces
attentes sont vraies pour la politique mais aussi dans le management, dans la
gouvernance économique... Mais dans l’exercice du pouvoir : elles sont
l’autre.
Ces idées
s’appuient encore sur des stéréotypes : les femmes prennent moins de
risques, elles sont plus réfléchies, plus prudentes, ce sont de bonnes
gestionnaires... Donc, il faut la parité pour apporter de leur
« sagesse ».
En politique
ce sont des femmes souvent jeunes, jolies, issues de la diversité qui
réussissent à percer : elles cumulent les « anciens handicaps »
de la diversité pour atteindre ce genre de poste, et ces points deviennent
leurs atouts pour rassembler, elles deviennent représentatives de groupes. On
attend d’elles qu’elles rapportent des voix, qu’elles performent, autant
qu’elles apportent une politique différente.
En France, la
conception de la femme active est proche du mythe de Wonderwoman, elles doivent
cumuler: féminité et vie professionnelle, au risque d’être méprisée, tout en
continuant d’assurer la gestion de la maison. C’est typiquement français de
théâtraliser : « j’assume tout ». Ces attentes ne se retrouvent
pas dans les autre pays comme aux États Unis.
Malgré les
évolutions, il faut rester vigilant que cette parité devienne une vrai
révolution culturelle et non une résolution conservatrice des anciens schémas
et stéréotypes qui ne permettent pas de penser la parité comme une égalité
d’être mais comme une égalité de pouvoir.
La politique
de mise en œuvre d’égalité est accélérée par la parité. Qualitativement des femmes
ont pris des délégations aux droits des femmes, au patrimoine, à la culture... Mais
en France la politique d’égalité n’est toujours pas une priorité.
Débat et questions :
Si une femme devient présidente, son mari
devient « 1er Monsieur »?
Cela est
difficile à concevoir dans l’imaginaire des français, qui ont un lourd passé
aristocratique : ce n’est pas tant impossible d’avoir une femme à la
présidence de la République, que de voir un homme relégué à son accompagnement.
C’est le vrai problème
en France :
on considère que si la
femme devient le « 1er sexe »,
l’homme devient le « 2ème
sexe ».
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire